mars 02

van gogh et hiroshige à la pinacothèque de paris

Van gogh et hiroshige

c'est quasiment devenu une habitude pour la picanothèque de paris de présenter, dans les deux ailes du musée, deux expositions établissant un parallèle entre deux artistes. cette fois, et jusqu'au 17 mars, elle fait le lien entre l'oeuvre de deux monstres sacrés de la peinture:…


vincent van gogh et, pour la première fois en france, utagawa hiroshige.

ce qui est intéressant ici, c'est l'angle que le conservateur du musée a choisi pour présenter l'art de van gogh. non pas sous celui de l'homme torturé, déséquilibré et schizophrène, sur lequel tout ou presque a été dit, mais sous celui de l'art qui lui a servi de référence, qui s'inscrit à l'opposé de ce qu'il a produit et dont on a très peu parlé jusqu'ici: celui du peintre japonais du 19ème siècle utagawa hiroshige, dont la philosophie, et c'est d'autant plus intéressant, reposait sur la solidité, la sérénité, le voyage et la paix intérieure.

l'exposition du 8, rue vignon (pinacothèque 2) – van gogh, rêves de japon – s'attache à montrer à quel point ce que l'on tenait pour des références isolées au japonisme dans l'oeuvre de van gogh était en fait une inspiration permanente à une période de sa vie. et le plus drôle, c'est que van gogh, qui était fou du japon, ne s'y est jamais rendu. au lieu de cela, il passait des heures chez un marchand d'art de la rue de provence, à paris, à nourrir son imaginaire des oeuvres de peintres japonais. pour l'homme torturé qu'est van gogh, le japon – surtout la représentation qui en est faite par des artistes tels que hokusai, utamaro ou harunobu – constitue un monde idéal par sa beauté, son esthétique, sa sérénité et le sentiment d'apaisement qui s'en dégage.

le peintre va donc faire de ce pays fantasmé un refuge, une réalité rêvée, encore accentuée par ses troubles psychiques. il s'exile dans le sud de la france et commence à peindre "ce qu'il voit", c'est-à-dire exclusivement en fonction de ses références au pays du soleil levant. ce qui offre un nouveau code de lecture de l'oeuvre du peintre, et c'est tout l'intérêt de l'expo qui s'attache à apposer à chaque toile son pendant japonais.

parallèlement, à quelques mètres de là, au 28, place de la madeleine (pinacothèque 1), se tient l'exposition hiroshige l'art du voyage. il faut savoir que hiroshige (1797-1858) est l'un des grands maîtres de l'art de l'ukiyo-e, c'est-à-dire "images du monde flottant", qui désigne le style très coloré d'estampes propres à cette époque, et en particulier de la représentation des paysages.

je connais très peu l'estampe japonaise mais j'ai trouvé intéressant le témoignage visuel qu'a laissé cet artiste dont le nom (qui était un pseudonyme, son vrai nom était ando tokutaro) signifie "l'atelier de mon propre plaisir". connu pour son illustration vivace de scènes citadines (les 100 vues – classiques et célèbres paraît-il – d'edo, le tokyo d'avant 1868), hiroshige emmène ensuite le spectateur dans un voyage mythique et méditatif sur les deux routes qui reliaient edo à kyoto: tokaido, la route côtière dite du sud, et kisokaido, la route du nord. la première comportait 53 étapes ou stations, la seconde 69, toutes deux proposant aux voyageurs des étapes abritant restaurants ou salons de thé, échoppes et auberges. cette oeuvre vaudra à l'artiste d'être immédiatement reconnu comme peintre paysagiste.

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un détail m'a surpris dans ces "clichés" de la société japonaise de cette époque: le trait de l'artiste qui, suivant le sujet, ressemble à celui d'un dessinateur de bd belge des années 50 ou 60. ligne claire, souci et précision du détail, les similitudes sont parfois frappantes. hiroshige n'avait pas non plus son pareil pour représenter la pluie. il y avait même une scène de feux d'artifice au-dessus d'une baie. impressionnant. les estampes de ces deux voyages ont paraît-il été très compliquées à réunir dans leur intégralité. deux expositions à voir absolument…

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(désolé pour la piètre qualité des photos)