juste
autre tic de langage qui est entré dans le langage courant il y a quelques années et que certains utilisent à tire-larigot: « juste ». « c’est juste trop bien », « je ne suis juste pas d’accord », « c’est juste pas possible », « untel? c’est juste le meilleur! » et pourquoi pas « c’est juste juste » pendant qu’on y est?!? et je ne parle pas de cette campagne de pub française pour la prévention routière (« j’ai juste un peu dépassé la limitation de vitesse », « j’ai juste bu trois verres »… « il est juste un peu…
… mort »), car l’adverbe est ici utilisé dans un tout autre sens, celui de l’atténuation. ah, la pub, toujours prête à se moquer de nos petits travers (pourquoi s’en priverait-elle?). mais dans le cas qui nous (pré)occupe, doit-on voir une traduction de l’anglais qui le sert à toutes les sauces (i just can’t believe you’ve just said that! »)? doit-on y déceler une volonté de « cooliser » (pas mal celle-là, non?) notre langage (« ce qui est bon pour les américains doit sûrement l’être pour
nous… »)? au-delà de ce mimétisme flagrant et quasi systématique (c’est une constante dans l’histoire de l’humanité, les petits ont toujours singé les grands et les faibles les forts), doit-on y comprendre une marque de renforcement du propos? entre « je ne peux pas le croire » et « je ne peux juste pas le croire », notons-nous une différence d’intensité? soyons justes: sans doute, encore que l’intention et l’intonation peuvent faire toute la différence, sans qu’il soit besoin d’ajouter des mots superflus. mais en l’occurrence, et c’est là un objet de dépit, ce mot est mal choisi. certes il est court et passe encore dans la langue parlée, mais véhicule-t-il une notion de justesse, au sens d’exactitude? non. ou au contraire d’insuffisance? pas davantage. il n’est utilisé que par effet de mode, que parce que « tout le monde le dit », que parce qu’il entre dans un parler-dans l’air du temps, jeune ou pas d’ailleurs, dont le sens n’est dicté que par l’usage (même si en grattant un tant soit peu, on s’aperçoit qu’il ne veut rien dire), et qui fait que l’on se classe dans l’une ou l’autre catégorie d’usagers de la langue française: les défenseurs et les abdicataires. le dictionnaire, qui rechigne devant bling bling (et on le comprend) n’a pas prévu cette acception. et on le comprend. lui, dirait probablement « je ne peux tout simplement pas le croire ». à juste titre…
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