roger tallon à paris

001
musée des arts décoratifs, 107, rue de rivoli, 75001 paris. jusqu’au 8 janvier 2017, entrée € 11.-.

à part les designers, graphistes et autres aficionados, qui connaît ou a jamais entendu parler de roger tallon? il y a des gens dont on ne sait même pas qu’ils existent mais dont on utilise pourtant les créations au quotidien. jugez plutôt: …

… les machines à écrire japy (1958-63), c’est lui, les trains corail (en service de 1975 à 1989), c’est lui, le tgv (1980), c’est encore lui, les caméras et projecteurs pathé, les montres lip, les bidons d’huile elf, les minuteurs terraillon et jusqu’au funiculaire de montmartre (1991), c’est toujours lui.

roger tallon (1929-2011) est de ces designers qui ont inventé le design. pionnier dans bon nombre de domaines, il commence sa carrière au début des années 1950 chez caterpillar, puis chez dupont de nemours et intègre technès, bureau d’études techniques et esthétiques fondé par le père de l’esthétique industrielle jacques viénot, en 1953. il crée une section design à l’école des arts appliqués de paris et y enseigne dès 1957. il travaillera notamment comme consultant pour les filiales européennes de dupont et pour la filiale frigidaire de general motors états-unis, pour laquelle il créera aussi le département design. en 1973, il quitte technès, dont il était devenu directeur à la mort de jacques viénot en 1959, pour fonder sa propre agence: design programmes.

tallon crée dans à peu près tous les domaines – arts de la table, mobilier, robots ménagers, et même moto – des objets qui accéderont très vite au statut d’objets culte. c’est le cas par exemple du premier téléviseur portable téléavia, qui sera mis en vente contre l’avis de la direction… et qui deviendra un gros succès commercial. l’équipementier de ski salomon fera appel à lui pour dessiner une nouvelle chaussure, fluocaril une nouvelle brosse à dents, et art press, revue internationale consacrée à l’art contemporain, sa première maquette (1972).

pour lui, le design n’était pas l’esthétisme de l’objet mais l’intelligence de l’objet. sa tâche consistait à rendre un produit cohérent à trois points de vue: la technique (est-ce faisable?), le commercial (le produit se vendra-t-il?) et l’utilisation (le produit fonctionnera-t-il sans problème pour l’usager?). considérant l’objet isolé comme dépassé (1988), il concevait volontiers des gammes complètes et envisageait surtout le design dans sa globalité: de l’identité visuelle à la signalétique, du marketing au graphisme, en passant par l’architecture intérieure. cela a été le cas notamment pour son registre de prédilection: les transports. ses trains corail (mot-valise pour confort et rail) marqueront un « brusque saut dans la modernité » et « produiront un choc en france » par leur intérieur sans compartiment. ainsi, tallon dessine non seulement les rames, mais aussi leur intérieur, avec les sièges, et jusqu’à la carte du réseau, affichée dans chaque wagon. pour l’anecdote, il créera même le nouveau logo de la sncf. le tgv sera pour lui à la fois une longue histoire et un beau succès. en effet, dès 1967, il se penche sur un projet intitulé tgv 001, qui n’est pas retenu. il lui faudra attendre 1980 et son tgv atlantique pour s’imposer dans un domaine qui manquait à son palmarès: la grande vitesse.

mort en 2011 à l’âge de 82 ans des suites d’une longue maladie, il travaillait avec daniel buren notamment à la création de la nouvelle ligne de tram de la ville de tours.